dimanche 20 mai 2012

Lettre du 06/05/2003


Étrangère à ma vie, à tout ce que je suis, à mon corps, à mon être : je suis si lointaine au monde. Ma réalité, faite de peurs, d’angoisses, de terreurs que je suis incapable de combattre et d’anéantir. Même plus de larmes, un sommeil perturbé par des cauchemars quand il daigne arriver…
Je suis lasse de me battre contre moi, contre cette autre en moi qui n’a pour objectif que ma destruction. Et pourtant je ne veux pas renoncer. Je veux me renforcer et gagner ma confiance. Je souhaite parvenir à m’aimer un peu, même un tout petit peu… Mais que ce tout petit peu m’empêche de me détruire et de sombrer. J’ai déjà trop vu le mal de tout ça, les extrémités de ce mal être.
Je me souviens…
Je vois… ce corps si frêle, si maigre traverser le couloir, la main posée sur la sonde reliée à son nez par un tuyau…
J’entends… ces pleurs d’une désespérée de la vie, pourtant mère…
Je sens ces odeurs de médicaments, dans ce long, si long couloir que j’ai arpenté si souvent. Ces allers-retours interminables de ce lieu clos où je devais passer des heures et subir les nuits.
Tant d’angoisses.
J’avais mal, j’avais peur le soir.
Les bruits de la rue, les lampes des infirmières de nuits venues s’assurer du sommeil des patients à leur garde.
Je dormais rarement quand elles passaient, mais mon immobilité m’assurait de leur bref passage.
Je renfermais mes peurs…
Je les renferme.
J’y suis encore tellement.
Mon esprit s’évade et retourne hanter ce lieu. La fenêtre, le café que j’ai tant observé alors je ne pouvais pas sortir.
Et les sanglots lourds à la vue de ceux que j’aime dehors tentant de voir mon visage… et moi, dedans, désespérant de leur faire savoir ma présence.
Ils ne peuvent me voir, la fenêtre est voilée de l’extérieur.
Comment une blessure qui ne se voit pas peut-être si douloureuse ?

06/05/2003

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